A l'assaut de l'ultra

100 kms de Belvès 2013

Championnat d'Europe, de France et d'Aquitaine des 100 kms

Belvès 2013

La saison 2012 s'achève sur deux défis sur route relevés : le premier est le 100 kms de Belvès bouclé en 9h50, le second le marathon de La Rochelle en 3h01.

La saison 2013, année de mes 40 ans, s'annonce chargée puisque je décide d'épingler deux gros objectifs sur mon calendrier : je choisis de repartir à Belvès car je garde un petit goût d'inachevé de ce week end sympa : des crampes sur les 40 derniers kilomètres ont quelque peu entaché ma performance... Au fond de moi, malgré la tache qui s'annonce rude, je suis persuadé que je peux améliorer tout ça et pourquoi pas m'approcher des neuf heures.

Pour le second objectif, ce sera le Grand Raid des Pyrénées version 160 kms pour 10000 m de dénivelé. J'ai déjà bouclé deux fois le 80 kms donc je me sens mûr pour passer à l'autre dimension.


Mais après mon marathon fin novembre, couru après une bonne prépa de trois mois concoctée par les cadres du Club, j'ai du mal à me relancer dans un entrainement intensif. Je passe pas bien mes séries sur la piste, je cherche mes allures. Un soir après la douche au stade, j'aperçois Maxime Cazajous, en civil, qui filme des athlètes passant un test. Il m'annonce que son coach s'associe à un autre pour entrainer des traileurs et tri athlètes.

Je lui témoigne mon intérêt et quelques jours plus tard, je me retrouve à mon tour sur la piste pour passer ce test : Pierre Gaspariau a accepté de s'occuper de mon cas et me voilà donc membre de Tri Trail Coaching.

Je ne renie pas pour autant mon club grace à qui je suis passé de rien à 3h sur marathon. Mais mes défis un peu hors norme nécessitent une préparation et une prise en charge un peu hors norme...


Le courant passe très bien avec Pierre et je prends le pari de lui faire confiance les yeux fermés. Ceci a l'avantage de m'enlever une grosse pression car quand on pratique l'ultra on est toujours en train de calculer ses kilomètres de peur de ne pas en faire assez. Là je sais même pas combien de temps ni de kilomêtres je fais par semaine.


Ma préparation se passe très bien, je progresse semaine après semaine. J'ai l'occasion de me rassurer sur la Pyrénéa que je boucle en fumant la pipe avec trois sorties vélos et sans avoir testé les skis. Cette bonne forme se confirme au Nouste trail que je fais au cardio en tenant les 25 kms à allure constante.


Après quinze jours tranquille pour arriver frais comme un gardon, nous voilà partis avec mon compagnon Gilles, recruté obligatoirement pour m'assister tout au long de cette course de 100kms. Il m'a déjà soutenu l'an passé et c'est important dans ce genre de défi de se reposer sur une personne qui me connait bien et qui est capable de savoir à quel moment me motiver, me parler, ou se taire.

L'arrivée à Belvès m'impressionne un peu, je réalise que je vais courir avec des athlètes de haut niveau. La majeure partie des pays européens est représentée, mais je me dis que de toute façon, je sais que je ne pourrais pas rivaliser, donc ça sert à rien de stresser.

Nous nous rendons ensuite au centre de vacances Fontenilles au Buisson de Cadouin, qui nous accueille pour pas cher en pension complète. Nous retrouvons là bas le reste de la troupe des Aigles. Je suis le seul à faire le 100 bornes en courant, quatre autres athlètes le font, mais en marchant !!

Deux autres font le 50kms, l'un en courant, l'autre en marchant.


Après une courte nuit de sommeil, un petit déjeuner avalé à cinq heures, voilà la petite troupe qui rejoint la ligne de départ. Mon échauffement se résume à quelques étirements, je vais bien assez courir dans la journée.


Le départ est lancé à huit heures, et après un tour de la ville nous voilà parti dans cette lutte contre nature. Nos accompagnateurs partis avant nous, attendent à dix kilomètres. Je prends cette portion comme un échauffement et me dit que quand je retrouverais Gilles il ne restera plus « que » 90 kilomètres. J'essaie de fractionner le parcours en petits objectifs pour rendre cette aventure plus humaine.

Je rejoins Gilles avant qu'il ait trop froid et nous voilà partis pour Sarlat. Ma progression est régulière, je cale mon allure au cardio, soit près de 12 km/heure. Je me retrouve avec l'équipe de France féminine qui avance presque groupée... la future championne de France, qui est un peu en retrait en début de course, remonte peu à peu ses compatriotes.

Je passe le marathon en 3h29. A ce moment là je me dis que si je rentre pas seul à Belvès j'aurais au moins fait ça.


A l'arrivée à Sarlat qui signe la mi parcours, je manifeste l'envie de m'arréter un peu mais Gilles m'explique gentiment mais fermement qu'on est pas venu ici pour faire du tourisme. J'ai mal vécu la partie vallonnée du parcours qui suit et j'avoue que j'ai un peu l'envie d'y aller à reculons. Mais là je grimpe les côtes facilement. Je remercie dans ma tète les Nayais pour la sortie montagne partagée avec eux quinze jours avant.

Au soixantième, les crampes ne viennent pas gacher ma progression. Là je commence à me dire que je peux faire quelque chose. Je consulte mes temps de passage que j'avais basé sur 8h30 en me disant d'essayer de tenir ce ryhtme sur les premiers 50 kilos pour avoir une marge de sécurité pour passer en neuf heures. Le constat est simple j'ai encore cinq minutes d'avance sur 8h30 à moins d'un marathon de l'arrivée. A partir de ce moment, je me mets en mode guerrier pour me contraindre à tenir mon allure. Au soixante cinquième, je négocie avec Gilles de marcher toutes les deux zones de ravitaillement, soit une cinquantaine de mètres tous les dix kilomètres. Mais il m'oblige à marcher vite !! Faut pas pousser non plus !! Au soixante dixième, je me dis que je suis obligé de finir, au soixante quinzième qu'il me reste un Nouste trail pour arriver.


Au niveau physique, ça devient difficile. Les crampes commencent à pointer le bout de leur nez sur les cuisses, les adducteurs, les mollets. Mais c'est supportable j'arrive à tenir à peu près mon allure. Gilles me motive, m'explique que je suis en train de faire un grand truc. A vingt kilomètres de l'arrivée, je commence à rattraper des coureurs d'équipes nationales.

J'ai tellement de douleurs que je sais plus où j'ai le plus mal. J'ai du mal à tenir l'allure. J'ai l'impression de courir un dix kilomètres et que je vais exploser en plein vol. Pourtant je suis à moins de douze à l'heure.

Au quatre vingt dixième, plus rien ne doit m’arrêter. Je continue à rattraper quelques coureurs, ils souffrent eux aussi et je me dis que tant que j'arrive à courir je pousse. Mon rythme cardiaque me semble plus haut que la moyenne mais je regarde plus ma montre. Chaque kilomètre est indiqué depuis les dix derniers. Je me base juste à ça pour progresser : 8,7,6 ….au cinquième, je me dis qu'il me reste plus que la boucle autour de chez dont je me sers pour faire du seuil. Là même en rampant, je finis. Je jette un œil sur le chrono et j'essaie de calculer si je passe sous les neuf heures. Il semble que oui mais à ce moment là mes capacités de mathématicien sont très limitées. Gilles me répète que je suis en train de faire un grand truc. Pour moi ce qui est important c'est en finir avec cette souffrance et passer sous les neuf heures. Car même à trois kilomètres de l'arrivée, j'ai peur de ne plus pouvoir courir, que la machine explose en plein vol.

Les deux derniers kilomètres approchent. Je les redoute particulièrement car ils ont la particularité d'être en pente. A ce stade là, c'est un mur à gravir. Je me mets en mode traileur et m'interdit de marcher. Pourtant c'est ce que je souhaite le plus. Les mètres passent, je sais que je vais finir maintenant et ma tête et mes jambes me demandent de finir en marchant. Mais là Gilles m'ordonne de reprendre la seconde féminine de l'équipe de France que j'ai en point de mire. Je m'exécute, la dépose (désolé ma galanterie ne fait plus partie de mes priorités) et je pose mon regard sur cette ligne d'arrivée là haut. Gilles continue à me motiver et voilà qu'il m'ordonne de rattraper un dernier coureur dans les cinq cent derniers mètres. Je passe donc l'arrivée au sprint sans pouvoir doubler le coureur devant. Quand je dis sprint, tout est relatif, je dois être à 12,5km/h... Je regarde le chrono car depuis l'ascension finale je n'ai plus la notion du temps. Verdict : 8h38 !! Là je me dis que Gilles avait raison : j'ai fait une belle course. Je pense à Pierre qui risque d'être content de s'être pris la tête pour moi. Sur la ligne, une femme me demande de lui donner mon dossard. A ma tête elle réalise qu'elle va devoir se débrouiller toute seule si elle le veut : enlever trois épingles à nourrice est un peu complexe pour moi en cette fin d'après midi.Une autre dame me mets la médaille de finisher au cou. J'ai failli lui tomber dans les bras... pour qu'elle m'aide à rester debout. Mais un gars se plante devant moi, me demande si je suis vétéran, et à ma réponse positive, m'annonce que je suis Champion d'Aquitaine. Je le regarde incrédule et lui rétorque qu'il a du se tromper. Il paraît sur de lui mais je finis par le faire douter. Il me dis donc d'attendre quelques minutes le temps qu'il vérifie. Mais je lui explique que je vais pas rester sur deux pattes bien longtemps, j'ai juste envie de m'assoir ou même me coucher. Il me dit qu'il saura bien retrouver mon maillot bleu... je lui demande de chercher en premier sous la tente des kinés, ce lieu me semblant bien indiqué pour poursuivre mon aventure.


Cette étape a été un peu compliquée à gérer tant pour les étudiants kinés que pour moi même. J'ai des crampes partout, dans les pieds, les jambes, le dos, les cotes... tout est compliqué : enlever mes chaussures, me coucher sur la table, me retourner sur le ventre... finalement après m'avoir massé les pieds et jambes, ils m'ont laissé sous une couverture une bonne demi heure.

J'en profite pour envoyer quelques textos puis la confirmation tombe : je suis champion d'Aquitaine vétéran1. L'officiel me demande si ça me dérange qu'il me remette la médaille comme ça car la remise des prix, programmée une heure et demi plus tard, risque déjà très longue à cause des championnats d'Europe et de France. Je lui explique que ça m'arrange car j'ai froid et j'ai juste envie de rentrer au centre de vacances pour me doucher. Comme il est situé à une quinzaine de minutes de Belvés je ne me sens pas capable de faire l'aller retour.


L'aventure se termine dans la souffrance mais avec la satisfaction de ne pas avoir fait tout ça pour rien. Je me dis que mes enfants vont être fiers de moi car ils attendent une victoire depuis longtemps. Il faut dire qu'ils sont mal habitués avec leur mère qui en ramène régulièrement. D'ailleurs quand j'annonce mon résultat à mon fils il ne me croit pas !!!



Je tiens à remercier tous les bénévoles présents tout le long de ce week end.


Ensuite je remercie ma famille pour accepter mes heures passées à m'entrainer,

mon coach Pierre pour avoir trouvé la bonne recette,

Gilles pour sa patience,

Olivier Bonnat pour son soutien

André et la République des Pyrénées pour leur article

et enfin le club des Aigles et Michel, chef de projet pour Belvés, pour le champagne.


Maintenant repos et dans quelques temps je repars sur les sentiers pour préparer mon second objectif.


Merci à tous pour votre soutien et tous vos messages de félicitations.

La vie est trop courte pour ne pas vivre certains de se rêves !


Article « la République des Pyrénées »






03/05/2013
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